Tic, tac. Les secondes défilaient, infernales, les rapprochant à chaque tic-tac de la fin, de leur mort, de leur retour sur le sol terrien. L'animal mort s'était avachi sur son arme, et le temps qu'il perdait à la retrouver éloignait Hazel de la survie, de la sortie, de la liberté. Il pouvait entendre ses gémissements de douleur au milieu des grognements de la bête qui l'attaquait, encore et encore. Il ne sut combien de temps il perdit à bouger la carcasse de l'animal tout en surveillant la situation entre sa co-détenue et son monstre du coin de l'oeil – trop, sans doute. Finalement, ses doigts touchèrent la crosse tant rêvée, et il s'en empara aussitôt.
Encore quelques secondes, et une nouvelle détonation, maladroite. Encore perturbé par le son, par le seul fait qu'il restait encore des balles dans le chargeur, il avait visé la masse sombre et tiré dès qu'elle se trouvait dans son viseur. Mais pour autant, il n'avait pas vraiment réussi son coup. Il put voir le chien être surpris, touché par la balle en plus des autres blessures qu'Hazel lui avait déjà infligé … mais il était encore debout. Encore immense, et encore à même de les déchiqueter tous les deux. La panique affluait dans ses veines, sous ses tempes. Quelle allait être la prochaine action de la blonde ? Il devait connaître ses futurs mouvements pour ne pas risquer de la blesser à cause d'une balle perdue – déjà qu'elles lui semblaient très chères, dans son chargeur. Il ne pouvait pas avoir tant de munitions que cela, ou alors le défi stupide de ceux qui les avaient coincés ici serait étrangement trop simple.

Il ne savait pas pourquoi ce foutu monstre était encore debout. Encore en train de s'attaquer à Hazel, alors qu'elle l'avait sans doute transpercé à plusieurs endroits avec la lame qu'elle avait choisit, et qu'elle avait encore entre les mains. La dernière balle qu'il avait tiré en direction de ce chien s'était elle aussi fichée sous sa peau. Il ne savait à quel point il l'avait effectivement touché, le pelage de la bête masquant le sang qui coulait. Il ne pouvait pas tirer à tout va non plus, de peur de blesser Hazel. Il devait donc s'assurer que la prochaine fois soit la bonne.
Il observa la blonde se démener encore pour tuer le monstre, s'attaquant à sa nuque alors que celui-ci se retourna vivement sur elle. Butcher put voir la lame toujours figée dans le pelage, et estima qu'il était temps d'en finir. Il voulut tirer une dernière balle, mais rien ne sortit du canon de son arme, ni projectile mortel, ni son. Inutile, il balance son arme sur la bête, qui rebondit mollement avant de s'écraser au sol. Avec le recul, il l'aurait peut-être gardé pour s'en servir comme arme contondante et frapper avec, mais c'était désormais trop tard. Et alors que le chien allait se jeter sur sa coéquipière une nouvelle fois, il se jeta comme un fou sur lui, s'accrochant à la fourrure et tentant d'attraper la lame. Il lui fallut plusieurs tentatives, durant lesquelles il se fit ballotter comme dans un rodéo, mais il referma enfin l'une de ses mains sur le manche. Oh, il ne chercha pas à retirer l'arme, bien au contraire, il la trouvait même plutôt bien placée.
Il secoua la lame un peu, tentant de déchirer les chairs tout en raffermissant sa prise. Le monstre n'aimait pas ce traitement, mais c'était à prévoir. Il s'accrocha au manche du poignard de toutes ses forces quand il se sentit basculer, tombant au sol. Dans sa chute, comme il l'espérait, il entraîna avec lui l'arme qui dessina une large ouverture dans le cou de la bête. Qui, elle, allait se jeter au sien, dans l'espoir sans doute de le tuer, maintenant qu'il était au sol. Butcher se prépara aussi à mourir, son optimiste du survivant ne lui réussissant pas à tous les coups. Mais les blessures qu'ils avaient infligés eurent finalement raison du second chien, qui n'eut pas le temps de refermer ses mâchoires sur lui. Les deux monstres s'évanouirent en pixels, comme si le premier avait attendu l'autre pour disparaître. Le soulagement béni se fonda à l'adrénaline dans ses veines, et un soupir de soulagement s'échappa de ses lèvres.
Ils étaient vivants. Amochés, mais vivants. Ils avaient battu les scanners et les chiens. Les flics et les barreaux. Et bah putain ...

Les deux MOBS ont été vaincus, les deux acolytes de fortune remportent la victoire. Les haut-parleurs grésillent et la voix s'élève froidement, tâchant en vain de cacher sa déception et sa colère : " Félicitations, vous avez gagné le droit de sortir d'ici. " Une nouvelle porte se déverrouille mais ne s'ouvre pas, laissant planer le doute sur la véracité des propos du fou qui les a enfermés là.

hors-jeu. derrière la porte, il n'y a qu'un long couloir sombre et une nouvelle porte qu'il faudra franchir pour déboucher sur une ruelle de la ville. félicitations. vous pouvez décider d'archiver maintenant ou de conclure.

Il en tremblait. Entre la joie et la terreur, l'adrénaline qui commençait à quitter ses veines et le soulagement qui l'avait envahi, il avait froid, il avait chaud, à l'aube de sa mort. Il n'était pas en colère, bien sûr, mais il aurait préféré être n'importe où que dans cette pièce durant ces dernières minutes. Tout était fini – du moins le semblait-il. Ils avaient réussi toutes les épreuves, tous les défis imposés et l'accord avait apparemment été de tuer ces chiens pour recouvrer la liberté. La vie. Le jeu.
Ils s'étaient envolés en pixels sous ses yeux ébahis. Les secondes s'étirèrent longuement, le temps que l'oxygène retrouve son chemin jusqu'à ses poumons, le temps que ses neurones se reconnectent entre elles. Et après ce qui avait semblé être une infinie attente, la voix grésilla à nouveau autour d'eux, sans qu'il ne sache vraiment d'où elle provenait. Elle annonce leur libération sur un ton … déçu, comme si celui, celle ou ceux qui avaient organisé cette sorte de spectacle avaient voulu les voir souffrir, mourir. Il ne savait pas comment une telle chose avait pu être organisée, mais il ne voulait pas y penser maintenant, alors qu'un déclic se fit entendre, libérant les deux prisonniers.
Il est encore au sol, tétanisé, quand il voit sa partenaire du jour se diriger vers la sortie. Il n'osait penser qu'elle allait le laisser là et s'en aller sans lui. En effet, elle se tourna vers lui, et il put croiser son regard, elle aussi bien amochée. Quelques syllabes qui s'échappent de ses lèvres, faible excitation qui leur aura coûté l'une de leurs plus grosses frayeurs, sans doute. Et puis, avant qu'il ne puisse la retenir, confirmer ou lui prier de l'attendre, elle s'écroula. Là. Sous ses yeux, sur le sol maculé ça et là de tâches de sang, la belle s'est évanouie. Hazel !
Même si ses forces se sont grandement envolées, Butcher puisa dans ses réserves pour se relever à moitié et s'approcher d'elle comme il le put. Il tenta de secouer ses épaules, de la réveiller. Rien n'y fit. Il s'étira jusqu'à ouvrir la porte, puisque ce serait tout de même stupide si celle-ci venait à se refermer. Puis il s'étira tout court, tentant de décontracter ses muscles rudement menés par la bête. Au bout d'un moment, il réussit à tenir sur ses jambes sans avoir envie de s'écrouler au sol. Un coup d'oeil par la porte lui fit constater que cette aventure n'était pas … tout à fait terminée. Ce qui les attendait encore était plus ou moins plongé dans le noir. Avant de s'y aventurer, il récupéra le couteau – l'arme à feu ne leur servirait plus à rien désormais – et porta Hazel sur l'une de ses épaules. Il dû s'y prendre à trois fois, mais il finit par réussir à se relever.
Ce qui se trouvait derrière la porte se révéla être un simple couloir, au bout duquel il put facilement discerner une nouvelle porte. Un éclat argenté attira son attention, et il retrouva avec un sourire ses armes, ainsi que d'autres qui lui étaient inconnues. Celles d'Hazel, sans nul doute, alors il s'en empara également, tentant de tout faire tenir à sa ceinture, dans ses poches et où il le put. Puis il poussa la nouvelle porte dans un nouvel effort, et se retrouva – enfin – à l'extérieur. Ouf ... Ils n'avaient pas menti, au moins à ce sujet, et les voilà saufs. Malgré le poids sur son épaule, ses blessures et la fatigue, Butcher se força à mettre le plus de distance possible entre l'immeuble et eux, avant de trouver refuge dans un autre immeuble à quelques rues de là. Il déposa la blonde sur le sol avant de s'écrouler à ses côtés.